Claudi se précipita sur le téléphone pour composer le cellulaire de son bienfaiteur. Comme je ne répondais pas, elle résolut de me laisser un message.
- Cher Ari ! Je viens de vous parler et vous saviez tout ce temps ce qui m’attendait à cet inimaginable hôtel. Je vous remercie du fond du cœur pour ce que vous faites pour moi et pour ce stupéfiant bijou, vous m’avez touché, je vous en serai éternellement reconnaissante et je vous embrasse.
Elle déposa le combiné avec une délicatesse toute féminine et se rendit silencieuse vers les immenses fenêtres qui plongeaient une vue panoramique sur le Golf Persique, vaste mer d’eau bleutée, étendue suprême, susceptible d’une tranquille sérénité tout autant que d’un déchainement apocalyptique. Son attention bifurqua vers le large. Elle songeait à ce qu’Angela lui avait dit :
- Ari te regarde avec des yeux amoureux.
Comment cela se pouvait-il ? N’était-elle pas la reine du décodage, capable de discerner avec certitude les archétypes, un kilomètre à la ronde ? Ce regard que posaient les hommes sur sa personne ne lui échappait jamais, pourtant celui d’Ariboudine la déconcertait. Il la mystifiait. Son imperturbable calme la troublait et l’agaçait tout à la fois. Elle sentait sur elle la permanente présence de l’attachement manifeste dont il la couvrait. Il revendiquait, sans jamais le dire, la souveraineté exclusive de son espace vital. Il naviguait silencieux, tel un voilier, sur les voies de son cœur, attendant l’heure de jeter l’ancre ou de déployer sa grand-voile.
En cet instant, sa mère lui manqua ; elle aurait su débrouiller son âme bouleversée et la rassurer. Cette dernière pouvait analyser froidement les faits et décortiquer le vrai du faux. Puis elle songea qu’elle lui dirait sans ménagement que cet homme est bien trop vieux pour elle.
- Mais toi, mère ! Lui répondrait-elle. As-tu oublié que papa avait trente années de plus que toi.
- Ce n’est pas la même chose ! Nous nous aimions.
La reine de la Toile résolut de se porter au lit sans manger, épuisée de cette journée. Elle sombra rapidement dans le sommeil, laissant derrière elle toutes ces merveilles, dignes des palais entr'aperçus par Sinbad lors de ses imaginaires pérégrinations.