- Que vas-tu faire ? Supplia madame Sanschagrin.
Le directeur se grattait l’occiput et ne répondait pas.
- Prends le téléphone. Maugréa-t-elle, en élevant le ton. Je ne veux pas revivre ça, tu m’entends, je… ne… veux… pas…
- Calme-toi, calme-toi. Je vais faire ce qu’ils demandent. Je n’en ai rien à cirer de la pin-up. Elle l’aura son heure de programmation. On va probablement réaliser des profits avec cette petite garce…
- Alors, qu’attends-tu pour l’appeler ?
Il ne trouvait pas de formulation adéquate pour annoncer à cette Claudi qu’il venait de changer d’idée. D’autant plus qu’elle risquait de le rabrouer vertement après son obséquieux refus. Et dire qu'elle avait même eu le culot de le planter là, au restaurant. Il lui faudrait mâcher son orgueil de mâle jusqu’à la moelle. Il devrait s’agenouiller devant cette arriviste. Quant à elle, ne baisait-elle pas le derrière d’un gros bonnet pour gravir aussi rapidement les échelons du succès ?
- Quelle salope ! Pensa-t-il. Voilà bien comment les gens font pour parvenir à leurs fins. Quelle garce !…
En ce qui le concerne, il justifiait toutes ses perfidies commises pendant des années, dont celle de partager le lit avec la propriétaire de TFr7 elle-même, s’assurant ainsi sa complicité et le plaisir de déclasser ses confrères dans son incessante lutte pour enjamber les paliers conduisant à la direction. Son épouse ne connaissait pas ce détail. Cela lui était aisé de jouer le jeu d’amant et de maîtresse avec cette femme déjà mariée ; la règle du silence fonctionne toujours tellement mieux dans cette situation où chacun peut préserver son union, gardant secrète leur vie adultère.
- Alors ? Tu te décides, pressa-t-elle la voix étranglée par l’émotion.